Skip to main content

Quartz, calcaire Paésine, agate et onyx, des pierres que l’écrivain et académicien Roger Caillois a collectionnées sa vie durant. Une passion pour le minéral qui le libère et l’amène à la poésie. Une majorité de ces spécimens provenant du fond du Muséum national d’Histoire naturelle est exposée pour la première fois, avec le soutien de Van Cleef & Arpels.

C’est à la faveur d’une tournée au Brésil que l’écrivain, grand voyageur officiant pour l’Unesco, se prend de passion pour les pierres. Un quartz offert en 1942 mais confisqué par les Douanes brésiliennes devint alors l’image symbolique du trésor perdu. Dix ans plus tard, Roger Caillois débute une collection se laissant contaminer par l’esthétique et l’imaginaire des minéraux qu’il nomme « objets-carrefours ou « objets-fées », une passion qui ne le quittera plus jusqu’à son décès en 1973.

Une relation intime au monde minéral

L’exposition met ainsi en regard ses textes emblématiques et près de 200 minéraux collectés et aujourd’hui conservés au Muséum national d’Histoire naturelle. C’est à leur contemplation que l’essayiste et grammairien, porté par une insatiable curiosité, va puiser une grande partie de ses réflexions et sa verve poétique. Cette passion pour les minéraux va donner naissance à des essais dont « L’écriture des pierres », son ouvrage le plus célèbre paru en 1970 célébrant la capacité du minéral à produire des images.

Entre rigueur scientifique et onirisme, cet œil averti voit la nature tel un peintre. Ainsi, une magnifique agate du Brésil aux tons orangés donne à voir une explosion nucléaire au-dessus de l’océan.
D’un fragment de paésine, issu des carrières de la région de Florence, on croit distinguer un paysage élaboré en miniature de la Toscane. Si le tracé délicat fait penser à l’œuvre d’un peintre, ces arborescences sont le résultat d’un processus géochimique dont la nature a le secret.

Au fil de sa collection, le fin lettré cherche non la pierre parfaite mais son pouvoir de suggestion, de ressemblance avec le connu, le familier. Point de mystère ou de main de Dieu à l’œuvre ici mais le pur hasard géologique que l’écrivain accompagne de mots. Car ses pierres collectées lui ouvriront la voie vers une nouvelle écriture dont des extraits sont à écouter tout au long du parcours de l’exposition.

Intérieur de l'exposition "Rêveries de pierre" à l'école des arts joailliers.

Vue de l'exposition « Rêveries de pierres : Poésie et minéraux de Roger Caillois ».

« Explosion nucléaire au dessus de l'océan » Agate, Brésil

« Explosion nucléaire au dessus de l'océan » Agate, Brésil. Paris, Muséum national d'histoire naturelle, collection de minéraux et gemmes. Photo François Farges.

Calcaire de type paésine Val de l'Arno (Toscane, Italie)

Calcaire de type paésine - Val de l'Arno (Toscane, Italie) Paris, Muséum national d'histoire naturelle, collection de minéraux et gemmes. Photo François Farges.

Agate Probablement Rio Grande do Sul (Brésil)

Agate - Probablement Rio Grande do Sul (Brésil) Paris, Muséum national d'histoire naturelle, collection de minéraux et gemmes. Photo François Farges.

Vue de l'exposition « Rêveries de pierres : Poésie et minéraux de Roger Caillois »

Vue de l'exposition « Rêveries de pierres : Poésie et minéraux de Roger Caillois » © L'École des Arts Joailliers.

Fluorite - Tule Melchor Múzquiz (Coahuila, Mexique), Paris, Muséum national d'histoire naturelle, collection de minéraux et gemmes.

Fluorite Tule Melchor Múzquiz (Coahuila, Mexique), Paris, Muséum national d'histoire naturelle, collection de minéraux et gemmes. Photo François Farges.

La poétique des pierres

De ses voyages en Amérique latine, il ramène des agates du Brésil et du Mexique qui lui inspirent des visions oniriques et célestes. Explorant l’imaginaire du vivant, celui figé dans la pierre, se laissant tenter par « le démon de l’analogie», décrit par Mallarmé, il projette dessus l’image d’« énormes gouttes de nuit », « d’ellipse obcure » et de « fœtus fabuleux ».
Fasciné par les jaspes de l’Idaho qui révèlent des formes simples entre cercles et triangles, il voit dans les pierres « des alphabets hors d’usage, dont le code est perdu ». Les anomalies et imperfections des pierres se changent en cicatrices et blessures. Le thème récurrent du masque occupe aussi une place importante dans sa collection où les pierres deviennent des « écrans sur lesquels se projette l’inconscient ».

Frédérique Chapuis

 

Grand escalier de l'école des Arts joailliers.

L’École des Arts Joailliers, Hôtel de Mercy-Argenteau.
16 bis boulevard Montmartre, Paris 9.
Du 6 novembre 2025 au 29 mars 2026.
Visites gratuites sur réservation.
Du mardi au dimanche, de 11h à 19h. Nocturne le jeudi jusqu’à 21h.
Visites guidées adultes : mardi, mercredi, vendredi et dimanche à 15h15 et 16h15, jeudi à 18h15 et 19h15.
Pour les enfants à partir de 7 ans : samedi à 15h15 et 16h15. Dates supplémentaires pendant les vacances scolaires.
Autour de l’exposition, des conférences, rencontres et tables rondes. Voir la programmation.

L’exposition s’accompagne d’un livre inédit de textes de Roger Caillois « Pierres anagogiques » co-édité par L’École des Arts Joailliers et les Éditions Gallimard.
Un ouvrage qui grâce au travail acharné de François Farges, minéralogiste de renom et commissaire de l’exposition, concrétise ce qui aurait pu être le dernier grand projet poétique autour des pierres de l’écrivain académicien.

En vente à la Librairie L’Escarboucle de l’École des Arts Joailliers.