Fidèle à son principe inaugural, celui de mettre en lumière des talents émergents, la galerie Beausoleil expose Hugo Babey. Sur les murs, sa série "Pigalle Night Out", de grands formats où les couleurs des néons insufflent une énergie mêlée d’excitation. "Burning Man" d'Antoine Guibert nous emmène, hors de la ville, dans le désert du Nevada, là où tout est possible. On est embarqués !
©Hugo Babey - @therealhugobabey
À la nuit tombée, les lumières de Pigalle se mettent à danser. Les sex-shops tentent d’appâter le chaland et les touristes en goguette quand les danseuses du Moulin Rouge s’apprêtent à monter sur scène. Le quartier s’est aseptisé, les truands et les « p’tites femmes de Pigalle » ont quitté le trottoir. Quelques endroits louches font encore de la résistance tandis que les bar à cocktails tendance ont investi le quartier, surfant sur l’image d’un Pigalle sulfureux et coquin. Les plus jeunes y cherchent encore le frisson, les rencontres et la fête.
Pigalle la festive !
C’est cette ambiance qu’a souhaité retranscrire Hugo Babey, jeune photographe, pour sa série Pigalle Night Out. Habitué à sortir dans le quartier ou simplement à le traverser, Hugo a utilisé un système de filtres maison, une technique permettant de « mettre à jour cette excitation, cette ivresse et féerie, en jouant sur la diffraction de la lumière » explique-t-il. Le résultat est une effusion de couleurs, d’images décalées dans une débauche de rouge, de vert et de bleu, que côtoient des zones plus sombres et mystérieuses.
L’ensemble est lumineux, empli d’énergie et de mouvement, on imagine hors champ toute cette foule venue faire la fête et s’étourdir jusqu’au bout de la nuit.
Mais on ne peut s’empêcher d’en traquer une note plus sombre. Simples façades, ces enseignes réfléchissent aussi une lumière factice sur des êtres plus solitaires, à la recherche de plaisirs tarifés, pour oublier un instant le goût de leur vie.
Expérimenter et s’imprégner
Photographe autodidacte, Hugo a appris la technique en expérimentant et en s’inspirant de livres de grands photographes. Il a fait ses armes au Pin Up Studio à Paris et gagne désormais sa vie en travaillant sur des shootings de mode pour des marques de luxe et des magazines internationaux.
Au-delà des clichés commerciaux, le jeune homme a développé en quelques années un sens de l’esthétisme et du détail, une approche plastique qu’il a pu approfondir en résidence à la Cité internationale des arts de Paris puis en côtoyant des artistes tels que Zane Lewis, Noëmi Manser et Alice Guittard.
Ses maîtres en photographie
D’emblée, Hugo cite le travail de Richard Avedon (1923 – 2004). La marque de fabrique du New-Yorkais : il a métamorphosé la photo de mode en sortant les mannequins de leur pose figée en studios pour les photographier, souvent en action, dans la rue, ou en boîte de nuit. Ses portraits en noir et blanc de personnalités pour le New-Yorker ou Life, dans un style minimaliste, ont marqué leur temps.
Seconde référence mentionnée par Hugo, l’Allemand Peter Lindbergh (1944 – 2019), qui a participé à l’essor des top-models à la fin des années 80. Préférant les shooter sans trop de maquillage et au naturel, il s’est intéressé à leur personnalité afin de faire émerger de leur beauté plastique une émotion.
Aujourd’hui, Hugo Babey est à la recherche d’un lieu/atelier, un espace nécessaire au développement de ses projets personnels.
©Hugo Babey - @therealhugobabey
Dans la partie atelier de la galerie, autre pays, autre décor avec les clichés d’Antoine Guibert, artiste permanent de la galerie, qui nous transportent dans le désert du Nevada au moment du grand rassemblement Burning Man lors de l’édition 2019. Le photographe, également chef-opérateur, reste la plupart du temps à distance des participants pour mieux refléter l’énergie transmise par le groupe. Dans ce lieu grandiose et hostile, une communauté éphémère et auto-suffisante se reconstitue tous les ans, chaque fin août, émancipée des règles économiques et privilégiant le travail créatif en commun. Des hommes et femmes libérés de toute contrainte, communient avec la nature dès l’aube, célébrant la vie simple et le collectif sous la chaleur écrasante du soleil de midi, devant les flammes d’un feu de joie à la tombée de la nuit. À l’heure où l’astre bascule, où la lumière se fait rasante et les ciels rougeoyants, on sait que le moment ne durera pas mais là est justement la force de la photo : rendre éternels des petits instants de bonheur.
Frédérique Chapuis
©Antoine Guibert - @antguibert
©Antoine Guibert - @antguibert
Galerie Beausoleil, 48, rue Notre-Dame-de-Lorette, Paris 9.
Horaires : du mardi au samedi : 11h/19h, Jeudi : 14h/21h
Expositions jusqu’au 31 mars.