C’est un endroit méconnu donnant sur un îlot de verdure planté de tilleuls, magnolias et autres cornouillers. L'hôtel particulier Cromot du Bourg est un ensemble de bâtiments historiques qui accueille logements sociaux, ateliers d’artistes, agence de style et bureaux de production. Dans la cour pavée, l’ancienne imprimerie est aujourd’hui dédiée à la danse et à la pratique théâtrale.
En 1735, c’est une maison style Louis XV qui est édifiée sur des terrains maraîchers, celle de Claude Gallerand, chef de la fruiterie du roi.
La propriété est rachetée par Jules-David Cromot du Bourg en 1762. Le surintendant des finances poursuit les travaux engagés et confie à Jean-François Chalgrin, le père de l’Arc de Triomphe, les agrandissements du corps de logis.
De nouveaux usages
La veuve de Jules Cromot du Bourg cède ses biens durant la période révolutionnaire au l’administration des Domaines Nationaux qui loue l’hôtel en différents lots.
Dès lors, le lieu connaît une occupation mixte avec la cohabitation de logements, de commerces et d’industries. Le bâtiment abrita notamment un entrepôt de farine, un carrossier et des bureaux financiers.
Un tournant artistique s’opère en 1827 avec l’arrivée du fabricant de pianos Ignace Pleyel associé à son fils Camille. C’est dans l’antichambre et le petit salon, que le jeune Frédéric Chopin donne son premier grand récital public en 1832. Un véritable succès. Les rappels se succèdent. Le tout Paris en sort conquis.
Au fil du temps, la rue Cadet n’échappe pas aux mutations urbaines. Les activités de commerce et de spectacles se déportent au delà des Grands Boulevards.
Au 9 de la rue, on voit l’arrivée de studios de lithographies et de photographies industrielles dont le porche conserve encore les traces. Les frères et mécènes Dutuit y hébergeront leur collection d’art avant de la léguer à l’État (visible aujourd’hui au Petit Palais), l’hôtel particulier revenant à la Ville de Paris.
De 1919 à 2010, les lieux accueillent entre autres le syndicat des négociants en perles et pierres précieuses et la Commission du Vieux Paris y établit son siège une douzaine d’années.
Contiguë au bâtiment principal, la Halle Jourdain construite en 1881, tient son nom de l’architecte Frantz Jourdain, connu pour son travail sur La Samaritaine. L’endroit abrita l’Imprimerie Nouvelle, association ouvrière créée durant la Commune de Paris.
Une réhabilitation réussie
L'hôtel particulier a fait l'objet d'une complète réhabilitation par la RIVP, l'Agence immobilière de la Ville de Paris.
Pour retrouver toute sa superbe, l’ensemble patrimonial resté vacant plusieurs années, et inscrit à l’inventaire des Monuments historiques, a fait l’objet de trois ans et demi de travaux. Un chantier mené par la RIVP, propriétaire des lieux, à partir de 2015.
Outre 19 logements sociaux et trois ateliers d’artistes, l’agence de tendance Nelly Rodi a posé son mobilier contemporain en 2018 dans les salons prestigieux du premier étage. Dans un entretien accordé à l’époque au Parisien, son président Pierre-François Le Louët expliquait : « Nous avons retrouvé les couleurs d’origine sous une dizaine de couches de peinture ».
Ouvert aux professionnels des industries créatives, l’endroit magnifiquement rénové accueille désormais des conférences, masterclasses, concerts et expositions.
Bureaux de l'agence Nelly Rodi dans l'antichambre de l'hôtel particulier avec des dessus de porte dit en « grisaille », typiques du style décoratif de la 2ème moitié du XVIIIe siècle, représentant des angelots.©Yannick Labrousse.
Intérieurs de l'agence Nelly Rodi dans le grand salon du 1er étage avec la présence d'un piano Pleyel de 1828. ©Yannick Labrousse.
En 2021, l’association Cromot remporte l’appel d’offres et prend les commandes de l’ancienne imprimerie entièrement réaménagée. Elle accueille de manière permanente les bureaux de production Les Indépendances et Fabrik Cassiopée et propose ponctuellement à la location des studios et espaces de travail pour des événements artistiques et des ateliers.
Si elle s’adresse en priorité aux professionnels du spectacle vivant, la maison d’artistes et de production participe à la vie culturelle du quartier.
Ainsi, les élèves de danse du conservatoire du 9e viennent répéter dans les lieux et suivre des masterclasses. Cette année, le public amateur peut s’initier au tango argentin et au théâtre. Ponctuellement, les week-ends, des workshops dédiés au swell dance et au gaga y sont organisés.
Frédérique Chapuis
L'association Cromot assure la gestion de l'ancienne Halle Jourdain. Les espaces dont 3 studios de répétition sont réservés à la création et aux adhérent·e·s.
Hôtel Cromot du Bourg, 9 rue Cadet, Paris 9.
La cour jardin est ouverte au public de 8h à 18h en semaine.
De 9h à 18h le week-end.