Dans son atelier de la rue de Vintimille, Fabien Barbazan confectionne des articles de petite maroquinerie selon la technique traditionnelle du point sellier. Une couture main pour des accessoires en cuir personnalisables, intemporels et qui se patinent avec le temps.
Fabien Barbazan dans son atelier-boutique de la rue de Vintimille
C’est parce qu’il ne trouvait pas de courroie en cuir à son goût pour son nouveau Leïca, au design iconique, qu’il souhaitait porter fièrement en bandoulière, que cet ancien photographe de mode, habitant du 9e depuis plus de 20 ans, s’est lancé sans vraiment le vouloir dans une nouvelle activité.
« Je voulais un modèle avec un point sellier mais je n’étais pas satisfait de l’offre sur le marché » se rappelle Fabien. Après de veines recherches et déçu, il se met à fabriquer lui-même la courroie de ses rêves. Il en poste une sur un forum qui trouve vite acquéreur. Une première vente qui en appellera d’autres.
Un apprentissage sur le tas !
Patient, cet autodidacte apprend de ses erreurs, défait et refait. « Le plus dur, c’est de coudre droit sur l’arrière. Au début, ça part en zigzag. Il faut des années de pratique pour réaliser un envers impeccable. »
À présent, il coud le cuir à un rythme soutenu, manie les aiguilles et l’alène losange sans même y penser. « Plus je me stresse et me mets de la pression, moins ça va couler. Il faut être le plus détendu possible pour obtenir un point serré et incliné d’une extrême régularité » confesse celui qui aime à rappeler que le point sellier est une technique issue de l’univers de l’équitation : » Cette couture était utilisée pour les pièces de cuir, les brides et selles, qui devaient résister à la torsion et la traction mais qui ne devaient pas blesser la peau de l’animal. « D’où par exemple l’utilisation de ce marteau rivoir qui permet d’abaisser les points dans l’épaisseur du cuir pour éviter tout frottement intempestif.
Par la suite, le point sellier sera adopté pour des pièces de cuir fortement sollicitées à l’usure comme les ceintures et les poignées. On doit à la maison Hermès d’avoir introduit cette pratique de couture à la main à la maroquinerie contemporaine.
D'une commande à l'autre
Fabien s’équipe en outils, range ses appareils photos, et découvre un milieu plutôt accueillant, « Des gens dont c’était le métier peu avares pour partager », laisse traîner ses oreilles chez son fournisseur « Les cuirs Chadefaux », maison centenaire établie dans le 10e et réputée pour ses cuirs de vache de grande qualité tannés au végétal à partir d’écorce d’arbre, en Toscane.
Après avoir fabriqué plusieurs années dans son salon « sur un petit billot de 60 sur 60 », puis partagé un atelier, il ouvre un pas-de-porte en 2019.
C’est ici qu’il découpe ses peaux, réalise ses coutures sur sa pince à coudre. Armé de patience et de ses seuls outils, deux aiguilles, une alène et du fil de lin préalablement passé à la cire d’abeille pour l’imperméabiliser.
Auparavant, il aura passé du temps sur la finition des tranches de cuir. « Pour un beau rendu, il est nécessaire d’araser les arêtes trop vives sur chaque bord avec un abat carre » souligne Fabien. Vont suivrent plusieurs étapes, celle du ponçage, du brunissoir, de la pose de la cire tranche, incolore ou de couleur, pour finir par un lustrage à la cire d’abeille.
Une courroie cuir pour porter son Leïca M avec élégance. C'est avec cet accessoire que Fabien a débuté dans la couture sellier.
Pour les ceintures, Fabien n'utilise que des boucles en laiton massif proposées dans différentes finitions.
Pour promener son toutou avec classe et en toute tranquillité. Une laisse bicolore cousue main au point sellier, résistante aux tractions.
Coupure du cuir à l'aide d'un couteau demi lune. Un outil qui permet de réaliser des découpes nettes et précises, droites ou arrondies.
À l'aide d'un abat carre, Fabien casse les arrêtes de chaque tranche pour les rendre plus lisses et agréables au toucher.
Le marquage permet de tracer une ligne parallèle au bord pour une belle finition couture.
À l'aide d'une griffe et d'un maillet, Fabien détermine l'emplacement de chaque point pour une couture régulière et parfaite.
Du sur-mesure pour toutes les envies
Ses portefeuilles, pochettes, ceintures, étuis à lunettes ou vides-poches, séduisent les amoureux du bel ouvrage qui souhaitent un objet unique qui leur ressemble. À s’offrir ou à offrir pour marquer un anniversaire, une rencontre…
Une fois la porte de l’atelier poussée, on discute formes, coloris et type du cuir, lisse ou pleine fleur, de sa provenance, vache ou exotique, de la couleur du fil de couture et de celle de la tranche, d’un marquage à chaud pour une incrustation d’initiales.
Tout est possible. Comptez à partir de 450€ pour un portefeuille classique.
Fabien, éternel insatisfait, se remet constamment en question et apprécie les challenges. Il répond à des commandes particulières comme ce magnifique porte-valise vintage à cinq bandes ou ce plateau gainé en cuir pour une table basse, en couverture du magazine de déco AD.
Aux plus jeunes, il leur dit : « En réponse à un monde dans lequel certains se sentent perdus, en revenant à des gestes simples, on peut s’épanouir », tout en précisant qu’on ne se lance pas dans ce métier pour s’enrichir.
Un travail manuel certes, mais qui nécessite de la curiosité intellectuelle : « Il faut nourrir l’esprit pour que la main bouge bien » conclut-il.
Frédérique Chapuis
Les peaux sélectionnées par Fabien proviennent d'élevages français. Teintes au végétal, elles vont se patiner avec le temps.
Une couture point sellier demande de la pratique pour obtenir un bon résultat, à l'avant comme à l'arrière de la pièce de cuir.
Le cousu main apporte un surplus d'âme aux objets. On fera attention à ne pas égarer son étui à lunettes.
Barbazan Paris
17, rue de Vintimille, Paris 9.
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