À la recherche d’un vélo sport pour affronter le peloton sur l’anneau de Longchamp, d’un modèle électrique pour vélotaffer, d’un stylé pour frimer, ou d’une bonne bécane pour faire le tour de l’Europe, vous êtes au bon endroit chez les Liber, une famille toute entière acquise à la petite reine.
Tout commence par quelques idées lancées en fin de repas. La Covid-19 a chamboulé nos vies, et les membres de la famille Liber, comme tant d’autres, se retrouvent confinés à la campagne. Une pause certes imposée mais qui offre l’avantage d’un temps à soi, l’occasion de faire le point et de réfléchir à la suite. Cela finit avec l’ouverture en avril 2021 d’un magasin dédié au vélo par Quentin et Justine, frère et sœur à l’état civil.
Associer le beau au choix
En poussant la porte de La Roue Liber, l’on investit un endroit spacieux, propre et bien rangé, les vélos rutilants incitent à l’échappée, le mobilier est choisi ; ici un canapé Chesterfield, une machine à café dernier cri, là, une ancienne commode chinée.
Même l’atelier de réparation, au fond, est nickel, les outils bien alignés au mur. « C’était notre souhait, indique Justine, la co-responsable du lieu, proposer un endroit à la fois joli, agréable et convivial dans lequel les clients se sentent bien et puissent échanger autour du vélo. » Alors oui, on est loin du garage à vélo de papa, à l’odeur de cambouis et salopettes bleues mais le client parisien ne perd rien au change.
Second arbitrage du duo d’entrepreneurs, commercialiser tous les segments du cycle, « du vélo de ville, au vintage retapé, en passant par l’électrique et les modèles pour la route », confie la jeune femme. À l’exception du VTT, toutes les tendances sont ici représentées, avec pour chaque profil quelques marques bien choisies et l’opportunité de répondre au besoin de toute la famille.
« Ce n’est pas facile tous les jours, mais on est là », admet Justine qui a quitté le monde du luxe et de la mode pour la petite reine, dans le sillage de son frère dont la passion pour le vélo ne date pas d’hier.
Quentin et Justine Liber, frère et sœur, ont ouvert leur magasin de cycles en avril 2021.
Un magasin tout en longueur, ponctué d'espaces pour chaque usage.
Le coin canapé pour se faire conseiller et discuter autour du vélo.
Le modèle hollandais
Adolescent, Quentin ne jure que par les vélos vintage, les cycles à pignon fixe. Plus tard, pratiquant le triathlon, il découvre les joies de la route sur des modèles ultra-profilés.
Alors cloué à son ordinateur au service marketing chez Renault France, le jeune homme rêve de faire de sa passion son métier. Bien décidé, il quitte son poste pour se former à la mécanique. Mais son profil dénote, les responsables de magasin l’engageraient plutôt à la direction des services achats.
En 2019, Quentin file à Amsterdam, la capitale du vélo. Au pays des tulipes, la bicyclette, plus qu’un moyen de transport, est un mode de vie. Son frère, le troisième des enfants Liber, réside sur place et lui facilite l’installation et les premiers contacts. Les Hollandais, plus ouverts, l’accueillent sans résistance et Quentin fait ses premiers pas d’apprenti dans un bikeshop. « J’ai tout appris là-bas », reconnaît le jeune homme.
Remplacer un dérailleur, un plateau, dévoiler une roue ou assurer une révision complète, Quentin maîtrise le sujet mais a d’autres ambitions. Il envisage d’ouvrir son magasin. De son côté, Justine, en pause après son premier enfant, est en pleine réflexion sur son avenir professionnel. Les deux diplômés d’école de commerce envisagent de se lancer ensemble, enrichissent leur projet et se laissent l’été 2020 pour y réfléchir.
Une rentrée sur les chapeaux de roue
Décision prise et business plan en poche, Quentin intègre l’INCM, le Centre de formation au métier du cycle, pour parfaire ses connaissance théoriques et pratiques. Une condition indispensable pour les banques et très rassurante pour les marques de cycles démarchées au salon Pro-Days, la mecque des professionnels du vélo.
Sur place, plus de 200 exposants avec des marques venues de toute l’Europe, mais la filière connaît à l’époque des moments difficiles se souvient Justine : « C’était une période compliquée car les professionnels souffraient de gros problèmes d’approvisionnement alors que la demande était forte. » Aujourd’hui encore, il faut parfois patienter plusieurs mois entre la commande et la livraison.
Même le made in France n’est pas épargné par ces ruptures d’approvisionnement, car si les vélos sont conçus et assemblés dans l’Hexagone, les pièces détachées proviennent essentiellement de Chine et de Taïwan, un indicateur comme dans d’autres secteurs de la désindustrialisation du pays.
Un emplacement stratégique
En octobre 2020, les Liber, qui « voient les choses en grand », se positionnent sur un local de deux étages, un ancien atelier culinaire, victime de la période Covid. Implanté dans un beau quartier, rue Vignon, aux lisières du 8e, le commerce draine la clientèle aisée du secteur et de la banlieue ouest avec la gare Saint-Lazare accessible à quelques roues de vélo. Il touche aussi une belle clientèle d’expatriés et quelques hôtels du quartier.
« Nous voulions être présent dans le secteur Opéra/Madeleine/Concorde », note Justine. Une évidence pour ces enfants de Montmartre qui ont grandi et fait leurs études dans un triangle privilégié, entre La Butte, le 9e et le 8e.
La Roue Liber est inauguré avec un petit noyau de clients en avril 2021, épaulé et suivi par plusieurs marques de cycles, avec au cœur de l’activité la relation client. « Je venais du secteur du luxe où le service et l’accueil étaient mon quotidien », souligne la jeune femme.
Des marques triées sur le volet
Se démarquant du poids lourd Decathlon à Madeleine, la famille a misé sur des marques de niche, telles Cervelo pour les passionnés de la route et triathlètes accomplis. Les dingues de design préféreront se tourner vers les modèles Cinelli, la marque italienne se distingue par ses collaborations avec des artistes et designers.
Autre proposition avec Cube, plus généraliste, « une marque allemande, leader du cycle en Europe, qui offre un bon rapport qualité/prix », note Justine. Pour les grandes traversées ou les courses de cyclo-cross, Quentin a misé sur la marque 3 T série Exploro, avec des modèles Gravel cadre carbone conçus pour s’adapter à la route et sur chemin.
Pour un usage de ville, La Roue Liber s’est orienté vers la marque française Infiné Cycles au look vintage. Autre proposition avec Pelago, un constructeur finlandais, pour des modèles classiques et confortables mais un peu plus lourds.
Parmi les marques représentées, la mythique italienne Cinelli pour des Fixies et Gravel.
Au sous-sol, des modèles Cube, robustes et légers avec cadre en alu.
Le secteur porteur du vélo électrique
Sur le marché du cycle, le VAE (vélo à assistance électrique) impose sa dynamique. La demande continue de croître, la concurrence est rude et les marques françaises bien positionnées.
Sur ce segment porteur, Quentin et Justine ont délaissé les français MAD, Voltaire et autre Moustache pour la marque belge Granville, aux modèles élégants, confortables avec leurs selles et poignées en cuir. « Leur distributeur nous a soutenu dès le début, note Justine, ajoutant, sur le VAE, la clientèle moins sensible à l’esthétique fera son choix en fonction de la qualité des équipements. » D’où la décision des Liber de privilégier une motorisation Bosch, réputée pour sa robustesse, l’équipementier automobile allemand étant devenu la référence pour les moteurs et batteries des VAE.
Autre proposition, chez Flyer, avec des modèles urbains, route et rando, une marque suisse haut de gamme dont les prix flirtent avec les 4 000 euros.
D’autres catégories de modèles électriques sont représentées. C’est le cas du vélo pliant de la marque Eovolt, créé par deux jeunes entrepreneurs français. Plié et déplié en à peine dix secondes, le modèle poids plume (16 kilos) passe facilement du placard au métro, au coffre de la voiture. Le modèle plus lourd (23 kilos) est aussi bien taillé pour se faufiler en ville que pour des trajets longue distance.
Pour les urbains avec enfants, Justine a trouvé la perle, un vélo-cargo qu’elle utilise chaque jour pour déposer sa fille à l’école avant de dévaler les pentes de la butte et se garer devant son commerce. Le modèle multi-fonctions GSD de chez Tern, avec une motorisation Bosch, autorise le transport de deux enfants à l’arrière et de la marchandise en toute sécurité. Avec sa potence pliable, ce longtail peut se ranger facilement à la verticale. C’est la bonne alternative à la voiture.
Les vélos à assistance électrique du fabriquant belge Granville.
Le vélo-cargo Tern pour transporter passagers et marchandises. Une conception compacte et peu encombrante.
Du service et du conseil
À la vente de cycles neufs, les Liber ont depuis les prémices du projet souhaité ajouter une prestation d’atelier, ce petit plus qui fait la différence. Quentin et ses trois apprentis se relaient pour les réparations aux heures d’ouverture. Pneu crevé, changement de tige de selle, remplacement d’une plaquette ou d’un câble de freins, check-up complet… l’offre est rassurante, très utile, appréciée des usagers et proposée à des prix corrects.
On le sait, la peur du vol est l’un des premiers freins à la pratique du vélo dans les grandes villes (6 631 plaintes relevées en 2020, soit 7 % de hausse par rapport à 2019). Si la ville de Paris s’est engagée à améliorer l’offre de stationnement sécurisée, encore insuffisante – vélostations en gare, velobox sur voies publics et consignes à vélo – , le recours à une assurance vélo (casse et vol) devient une nécessité. En ce domaine, il y a pléthore de propositions.
En sus d’un marquage sur le vélo ou dans le moteur électrique, La Roue Liber fonctionne avec un assureur. Comptez une moyenne de 15 € par mois pour assurer un modèle électrique d’une valeur de 2 500 euros. « Mais à ce prix-là on ne laisse pas dormir son vélo dans la rue », relève en souriant Justine. Même avec un bon système anti-vol.
Enfin, au sous-sol, un service d’étude posturale ou Bike Fitting est proposé sur rendez-vous par un prestataire extérieur, Yannick Lamarque, triathlète accompli, diplômé d’Etat et formé au Creps de Poitiers.
Des vélos connectés, des accessoires lookés
L’hyperconnexion des vélos est en marche. Les nouveaux modèles offrent désormais tout un tas de fonctionnalités : informations en temps réel (navigation, vitesse, distance parcourue, autonomie de la batterie…), une meilleure sécurité (alarme anti-vol, blocage des roues à distance).
Sur ce secteur, les Liber travaillent avec la marque Cowboy, un fabriquant belge, dont les cycles sont livrés avec capteurs intégrés et une application dédiée à charger sur smartphone.
Plus accessibles, les modèles Tenways venus de Hong Kong, sont équipés d’un petit écran qui permet d’obtenir différentes données pour moins de 2 000 euros.
Enfin, l’équipe en atelier a la possibilité d’ajouter des équipements type GPS ou alarme sur les vélos classiques.
Réparations et révisions en ateliers, un service plébiscité par les clients.
Côté accessoires, Justine a flashé sur la marque française de casque Egide. Elle connaît bien les modèles colorés en résine avec visière incluse, qu’elle utilise au quotidien. On retrouve bien sur les selles anglaises Brooks, de beaux produits en cuir qui à l’usage se font à l’anatomie du cycliste ou encore une sélection de textiles, maillots, gilets, cuissards et tenues de pluie.
Des casques hyper design, légers et protecteurs chez Egide. En bas, les modèles urbains pliables de chez Closca.
La selle Brooks en cuir que tout le monde s'arrache.
Des maillots du japonais Pedaled pour un look très fifties.
Toutes les pièces usagées sont récupérées par un ferrailleur
Le recyclage, encore compliqué…
Avec l’augmentation du nombre de vélos électriques en circulation, la filière de recyclage des batteries se met petit à petit en ordre de marche – les fabricants garantissent en moyenne 500 cycles de charge, soit une durée de vie de 5 à 6 ans pour un usage modéré, il reste des progrès à réaliser. Aujourd’hui, la collecte passe par les vendeurs. Si l’organisme Corepile assure une collecte gratuite lorsque le volume atteint 90 kg, c’est une solution peu envisageable pour les Liber qui déposent donc les batteries au point de collecte le plus proche, celui d’un magasin de bricolage. Aujourd’hui, seuls 8% de ces batteries composées d’éléments chimiques polluants et dangereux, sont recyclés.
L’ensemble des déchets métalliques liés aux réparations sont eux récupérés par un ferrailleur une fois par mois. Quant aux chambres à air, elles sont remisées puis offertes à des associations qui les utilisent lors d’ateliers d’art plastique. Restent les pneus. « Nous n’avons pas trouvé de filière efficace avec un principe de collecte simple », regrette Justine.
Après deux ans d’activité, le pari risqué d’un grand magasin de quartier semble porter ses fruits. Le bouche à oreille fonctionne et Justine est confiante : « On a réussi à mettre en place une base solide et fidèle de clients venant de divers horizons. »
Une richesse qui fait aussi les joies du métier. Ainsi, ce couple passé commander des vélos pour son mariage ou ces deux amis venus choisir les montures qui les mèneront, espèrent-ils, jusqu’à Dakar. « On leur prépare deux Cinelli en cadre acier, résistants et confortables. Si un vélo casse au milieu de nulle part, au moins, un mécanicien local pourra le ressouder», glisse Justine.
Les Liber pratiquent le vélo, pensent vélo, rêvent vélo. Ils proposent même des sorties. Un petit message sur Instagram et voilà un petit groupe en échappée en Vallée de Chevreuse, à Versailles ou à Longchamp.
Frédérique Chapuis
La Roue Liber, 32 rue Vignon, Paris 9.
Horaires : du mardi au vendredi : 10h – 19h
Samedi : 11h – 18h.