Les deux n’étaient pas forcément fait pour s’entendre. Vincent Daussy originaire de Normandie et Raphaël Peyronnel arrivant de sa Bretagne natale, ont su mettre leurs rivalités géographiques de côté, vite balayées par une passion commune : les jeux de sociétés.

À l’époque, ils partagent une colocation sur Charenton, chacun conduisant sa vie professionnelle, l’un dans la gestion de patrimoine financier, l’autre responsable d’un rayon dans une moyenne surface. Ils passent leur temps libre à jouer et à écumer les boutiques de jeux. Lors d’une énième virée chez Ludifolie, leur QG à Vincennes, Vincent émet une hypothèse un peu folle : pourquoi ne pas ouvrir notre propre boutique ?
Après réflexion, étude de marché et business plan, tous deux quittent leur poste respectif, « Le matin, je n’étais pas particulièrement réjoui d’aller travailler » admet Vincent, et se lancent dans l’aventure entrepreneuriale.

Le marché est porteur. Avec plus de 30 millions de boîtes vendues chaque année en France, les jeux de société devenus aussi un loisir d’adultes, connaissent un vrai âge d’or. Les chiffres en constante augmentation rassurent les partenaires sollicités dont BPI France et Paris Initiation Entreprise. Une campagne de crowfunding complète le financement.
Leur premier local, avenue du Père-Lachaise, à deux pas de la place Gambetta, dont ils achètent les murs, coche toutes les cases avec une partie boutique et un espace en sous-sol pensé pour des soirée jeux et des sessions d’Escape Game.
Sans pour autant minimiser les efforts consentis, notamment la première année, et la perte de salaire, les anciens salariés ne regrettent rien : « On a pas l’impression d’aller travailler. »
Depuis, l’équipe s’est étoffée, les créateurs retrouvant un peu d’air et surtout le temps de quelques parties entre amis.

Trois ans après l’ouverture de leur première boutique, les deux associés ont l’opportunité de s’installer dans le 9e et inaugure leur deuxième adresse en décembre 2024.
Sans concurrence immédiate, assurés de toucher un public au niveau de vie relativement aisé, Les Gentlemen du Jeu attirent les premiers jours d’ouverture, une clientèle plutôt familiale, assez peu expérimentée et à la recherche de conseils d’achat.
« Si naturellement, la clientèle se dirige vers des produits très marketés, on est là aussi pour ouvrir la proposition et accompagner petit à petit vers des jeux plus stratégiques » rappelle Vincent.

En lançant leur projet, Vincent et Raphaël se sont appuyés sur trois grands principes.
Ils ont voulu créer un lieu moderne, lumineux et accueillant, sorte « d’Apple Store du jeu de société » en présentant les boîtes de face, et non sur la tranche.
Une mise en valeur rendant justice au graphisme de plus en plus léché, les éditeurs faisant désormais appel à des illustrateurs de renom.
On navigue donc aisément entre les tables et les rayonnages de bois présentant les grandes familles de jeux.
Deuxième principe guidant l’affaire, mettre en rayon uniquement des jeux testés, validés et appréciés par l’équipe de collaborateurs. Si l’offre référencée est moins importante qu’en boutique traditionnelle, elle est maîtrisée sur le bout des doigts.

Enfin, et c’est sans doute la donnée essentielle, l’équipe mise sur le conseil pour faire la différence. Savoir écouter, aiguiller, prendre le temps d’expliquer les règles du jeu, qui peuvent parfois rebuter,  avec un seul objectif : que le client, débutant ou initié, reparte avec sous le bras un jeu qui lui convienne et qu’il revienne, la fidélisation étant un rouage essentiel de la bonne santé de l’activité.

Aux Gentlemen, toutes les grandes familles de jeux sont représentées, répondant à toutes les envies : des jeux d’apéro aux règles simplissimes, réelle porte d’entrée, tel ce « Ink it », pour des parties entrecoupées de fous rires, en passant par les jeux de stratégie familiaux, coopératifs ou non, citons le classique « Les Aventuriers du Rail », et l’offre pour deux joueurs, montée en flèche pendant le Covid, « qui a permis aux couples de ne pas s’écharper » précise Vincent, sourire en coin.
Dernière famille, les jeux d’enquêtes et de déduction qui se jouent seul ou à plusieurs comme ces « Dossiers Criminels » où dans la peau d’un enquêteur, toutes les pièces à conviction devant lui, le joueur doit résoudre un crime.
N’oublions pas les jeux de cartes à collectionner (Pokemon, Star Wars, One Piece, Locarna ou le français Altered TCG), appréciés des enfants comme des adultes.

En sous-sol, une pièce aménagée est prévue pour de prochaines sessions de jeux et autres Escape Games pour les vrais passionnés.

Frédérique Chapuis