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Ancienne architecte d’intérieur, Caroline a ouvert en 2020 son atelier de céramique au 31 rue Bellefond. Elle y travaille la porcelaine et le grès, modelés, tournés ou moulés. Des pièces utilitaires et décoratives cuites sur place. Une belle découverte qui tombe pile-poil à l’approche de Noël.

« J’ai toujours aimé courir les expos de céramique. Je ne ratais jamais les journées de Saint-Sulpice ou encore le rendez-vous à la salle Olympe de Gouges dans le 11ème » explique Caroline, pull rose clair, on apprendra plus tard qu’il s’agit de sa couleur fétiche, et foulard noir répondant aux montures de ses lunettes. Aux oreilles, des boucles de sa confection, « légères et douces. »
De son ancienne vie professionnelle, Caroline a conservé le goût du travail en volume et celui de la lumière. Avec la terre, elle a ajouté un troisième élément, aujourd’hui indispensable à son équilibre. Son père lui a toujours dit qu’il fallait l’adopter, être patient, la respecter.

La céramiste se remémore sa vie d’avant, celle d’architecte d’intérieur, un vingtaine d’année exercées en indépendante pour des particuliers et des professionnels (conception de boutique pour Hermès art de la table, Puiforcat et Saint-Louis au Kazakhstan, pour les couteaux Forge de Laguiole, pour La Tropicale, glacier artisanal…)
Un métier toujours guidé par son intérêt pour les savoir-faire, l’artisanat et les métiers d’art. Elle participera, en lien avec l’agence François Lérault, à la restauration de l’hôtel Barillet*, signée Mallet Stevens. Éclairages, revêtements, serrureries et huisseries, tout est à travailler dans les matériaux et motifs d’origine. Un sacré challenge alors que la plupart des archives du maître ont disparu.

Des cours pour assouvir une passion

Son attachement pour la céramique la conduit à s’inscrire aux cours du soir dispensés par l’école ATC (Arts et Techniques Céramique) qui vient d’être créée à l’époque par deux grands céramistes, Grégoire Scalabre et Christophe Bonnard. C’est là qu’elle s’initie aux techniques du tour, de la plaque, du colombin et du pincé. On la retrouve ensuite chez Céline Huteau à Vincennes. « J’aimais son approche super exigeante et délicate sur la porcelaine », un matériau très solide une fois cuit mais fragile à travailler. « C’est une matière très capricieuse. Elle garde en mémoire toutes les interventions réalisées donc inutile d’essayer de rattraper un petit couac, cela se verra à la cuisson » précise Caroline qui se perfectionne en coulage auprès d’Alexandra Garrigues. Elle apprend ainsi à créer des moules en plâtre, pour y couler de la porcelaine et obtenir des pièces inédites comme ces vases cannelés émaillés.

Portrait de Caroline Flé dans son atelier

Caroline Flé est installée depuis 2020 rue de Bellefond dans le 9e.

Trois vases en grés naturel

Vases trilogie Capucine en grès porcelainique, émaillé blanc opaque à l’intérieur.

Trois vases de tailles différentes servant de pots à douceurs

Cannelés - Ensemble en porcelaine, vendu en lot ou séparément.

Plat de présentation série Armagnac de Caroline Flé.

Collection Armagnac. Plat à gâteau ou apéro.

Un projet à part entière

La céramique initialement exutoire devient une nécessité. À quelques mois du confinement, Caroline se décide à intégrer un atelier de céramique près de la gare du Nord, « J’ai fait un premier essai de trois mois et je ne pouvais plus en sortir » se rappelle-t-elle. Mais avec l’absence d’activité liée au Covid, l’endroit ferme. C’est alors la course pour retrouver un nouveau lieu. Ce sera rue Bellefond, chez une céramiste déjà installée. Au bout de quelques mois, cette dernière lui cède le bail. Caroline rachète le four, aménage le local à sa façon, repeint les murs et lance son activité.

Un savoir-faire au service du beau

La céramiste travaille les arts de la table, alliant l’utilitaire au décoratif. Sur les étagères, trônent des assiettes, des gobelets et plats, des vases et des suspensions.
Caroline apprécie la matière brute, associe un grès chamotté à un émail satiné, afin d’amener un peu de douceur à l’objet.
Pour ses vases « trilogie Clémentine », elle repousse la terre puis l’affine, et finit par un ponçage-lissage au quartz, qui donne cet extérieur lisse et doux. Pour ses vases aux noms évocateurs “Douceur” et “Baiser”, elle s’élance et crée la forme sur le vif.  Elle ponce la partie supérieure, que l’on appelle la lèvre, jusqu’à obtenir une matière aussi fine qu’une feuille de papier. Jouant avec les épaisseurs, le grain, les torsions comme un drapé, la céramiste confère à ses pièces une délicatesse, une sensualité à « fleur de pot », chaque vase étant unique.

Sa dernière collection de vaisselle “Armagnac”, « J’aime ses parfums et sa couleur », est liée à son héritage maternel. Originaire des Landes, sa mère proposait cette eau de vie en fin de dîners. Une madeleine de Proust que la céramiste a réussi à transposer dans ses créations, témoignage d’une histoire familiale.

Son ancien métier lui a permis d’imaginer et de confectionner une table basse avec trois pieds en grès chamotté « parce ce que la céramique, ce n’est pas que des assiettes ».
Un matériau que l’on retrouve dans une série de boucles d’oreilles et de sautoirs en porcelaine non émaillé, dans de petites médailles personnalisables, à offrir lors d’un événement (mariage, anniversaire) ou sur un projet de fèves pour les pâtisseries Jojo and Co et Noglu, à retrouver dans les galettes début janvier.

Répondant à un besoin particulier du restaurant 42 Degrés, un gastro crudivore, elle a réalisé une trentaine d’assiettes, « Je suis venue projeter une engobe, un mélange de terre et de pigments de couleur sur la terre crue » et ainsi signer un décor unique pour chaque pièce. C’est précisément ce qui a séduit le chef Fabien Borgel pour mettre en valeur sa cuisine à l’occasion d’un événement privé.

Caroline dans son atelier

Caroline a trouvé son équilibre en travaillant la terre

Des émaux fabriqués maison

Tel une alchimiste, Caroline fabrique elle-même ses émaux liquides, « on s’échange les recettes entre céramistes », pour obtenir ses propres teintes.

Elle réalise ses essais sur de petits tessons de terre de différente nature (grès rouge, blanc, chamotté, lisse, porcelaine) tous référencés, multiplie les dosage, superpose les émaux pour des effets de fusion. Un principe appliqué à sa série « Clair de lune » associant un bleu nuit à un coloris blanc-crème.

Essais de coloris d'émaux sur des tessons de terre

Sur chaque tesson, un essai d'émail référencé.

Assiettes émaillées bleu nuit et crème

Clair de lune, assiette en grès porcelainique avec émaux maison.

Des temps de cuisson longs

Chaque samedi en fin de journée, la céramiste programme son four qui va monter en température pour atteindre 950° à la première cuisson. À l’intérieur, les pièces sont simplement empilées. Une fois bien sèches, elles seront émaillées en transparence ou en couleur, et ainsi rendues étanches. La seconde cuisson, toujours d’une trentaine d’heures, nécessite une montée à 1250° et une organisation à l’intérieur du four pour éviter toute fusion d’émaux entre les pièces. Des temps de cuissons longs qui impactent les charges, la facture d’électricité a bondi de 50%, depuis 2022.

Son vœu pour 2024 : suivre une formation professionnelle à plein temps et obtenir son CAP de céramiste. Comme elle le dit si joliment « Faire une théière c’est un peu comme en archi, savoir réaliser un escalier en colimaçon, ou en dessin, le corps humain ». Ensuite, on peut tout faire.

Un lieu de rencontres et de transmission

Dans une démarche de partage, Caroline anime des ateliers découverte de 2h30 pour des petits groupes constitués (3 personnes max). Entre amis ou en famille, c’est l’occasion de fabriquer deux petits objets (bol, tasse, mug, coupelle…), de les décorer à l’engobe et de les personnaliser. La céramiste assure le séchage et la cuisson. Une idée de cadeau à offrir ou à s’offrir.
Des ateliers pour enfants (7 – 11 ans) sont également proposés au trimestre, pendant les vacances scolaires ou ponctuellement à l’occasion d’un anniversaire.

Frédérique Chapuis

*L’hôtel Barillet (square Vergennes, 15e) entièrement rénovée au cours des années 2000 est une réalisation de l’architecte Robert Mallet-Stevens en 1932. Créé à l’origine pour un maître-verrier, cet atelier-prototype, “véritable manifeste d’avant-garde du rationalisme français”, a été racheté en 2018 par Xavier Niel. L'immeuble est aujourd'hui occupé par Matrice, un institut d'innovation technologique et sociale qui organise régulièrement des résidences artistiques, et ouvre ses portes au public lors des Journées européennes du patrimoine.

Caroline Flé Céramique

31 rue Bellefond, Paris 9.
Horaires d’ouverture : du lundi au vendredi, de 9h à 19h.
Samedi : de 10h à 19h.